Pour célébrer cette nouvelle carte du tarot que nous co-créons avec mon épouse RoseButch!
Visualiser la Grande Prêtresse
Regarde-moi! Je suis ici depuis si longtemps que je me suis fondue dans les lieux. J’ai fusionné avec les éléments. Les araignées tissent leurs toiles autour de moi. Elles défient la gravité. Elles prennent le temps. Je me dois d’être précautionneuse pour respecter le fruit de leur labeur. Pour qu’elles se nourrissent. Pour que leurs voiles gardent les profondeurs de la caverne.
La mousse s’attache à mes semelles. L’humidité ne m’affecte plus comme avant. Elle assure la fertilité de l’existence souterraine. L’obscurité ne m’effraie plus. Mes sens ont pris l’habitude de ne plus tout trier, tout savoir, tout comprendre. Je ressens. C’est déjà bien assez!
Pose-toi sur la roche sans troubler les stalactites ni te heurter aux stalagmites. Regarde-moi.
Je suis là depuis si longtemps. Nous co-existons depuis si longtemps. Tu connais pourtant bien peu de moi. Tu me sens à peine respirer. Il t’est loisible de m’oublier.
Regarde-moi de temps en temps.
trempe tes doigts dans l’eau des profondeurs
dirige ton regard vers le croissant de lune
laisse l’ineffable t’hypnotiser
ta mémoire ancestrale te revenir
tes réflexes animaux te conduire
tes connexions se rétablir
l’Invisible t’emplir
l’intuition te nourrir
Tourne-toi de temps en temps vers tes instincts sachants
vers ton puits de connaissance que rien ne valide, rien n’invalide à part la certitude intuitive de ton corps, de tes sens et de ce qui passe leur filtre
ce qui frôle, qui s’appuie, qui coule
Reste là le temps de sentir la puissance
le temps de te sentir changé.e
chargé.e
Comprendre La Grande Prêtresse
Impassible? Passive? Insensible? Au contraire!
La Grande Prêtresse est assurément calme. Mais derrière sa mine imperturbable? Tout comme derrière le rideau tendu derrière elle: tumultueux!
Comme carte associée à la Lune, c’est inéluctable: la Prêtresse est une carte de changement! Nous observons tout un cycle de ce satellite en 29 jours. Les émotions fluctuent. La Lune, corps céleste humide, leur trouve du liant. Elle les mélange. Elle colle avec ses fluides les faces et les phases morcelées.
Si la Grande Prêtresse paraît austère, c’est qu’il y a fort à faire. Si iel est inactif.ve, c’est qu’iel est connecté.e à des fréquences, des mondes, des profondeurs qui exigent un état de concentration absolue. Iel n’est pas en retrait de ce monde. Sa connaissance des fils qui relient les différents mondes lae rend très présent.e. Iel prend son temps parce qu’iel ne laisse pas l’urgence des humain.e.s et leurs pendules capitalistes dicter son rythme. On lae taxe d’indifférent.e. Iel vibre au rythme des secrets.
Des secrets du moins en apparence dans un monde qu’on s’est évertué.e.s à désenchanter. En réalité, rien n’est plus simple que de se laisser glisser sur les fils entre les mondes, de briller dans les interstices. Il suffit d’accepter le calme, la non-consommation du savoir. Accueillir la fermentation du savoir, devenir champignons, cet Invisible nécessaire à la vie sur terre.
On ne peut se hâter pour accéder à ces connaissances: elles sont dans le vol des oiseaux migrateurs, au fin fond de nos rêves, dans l’humus de nos forêts, dans la mousse sur les parois de la grotte. Elles sont versatiles. La vérité d’aujourd’hui se verra sans doute bousculer par celle d’hier, remontant des tréfonds, ou engloutie par les vagues de celle de demain.



La Grande Prêtresse est une créature liminale. Iel est gardien.ne de la multiplicité. Iel se tient au passage entre les dualités. Iel nous invite à les comprendre pour mieux les abolir.
Tandis que La Magicienne démultipliait à l’envi, La Grande Prêtresse observe les multitudes subtiles qui se déploient.
Tandis que La Magicienne faisait activement office de médium, la Grande Prêtresse regarde passer les courants. Iel les lit. Iel les relie occasionnellement. Iel est le lieu de rencontre, le croisement, la convergence. Dans cet espace-temps, la patience est de mise. Les frontières sont floues. Les marqueurs spatiaux-temporels sont confus. Les piliers ne maintiennent rien. Ces stalactites et stalagmites racontent le temps longs. Les danses inter-espèces sont perceptibles. Les modes de communication plus-qu’humains et ancestraux sont privilégiés.
Ici, le cartésianisme et autres idéologies de la séparation ne passent pas le seuil. Elles doivent être dissoutes. Ici la primauté humaine s’évapore. Bienvenue dans la réalité de l’animisme!
La perception change. Derrière le voile de la suprématie de la pensée, des hiérarchies et de la dissociation, le monde dont nous faisons partie est animé tout entier. Face à la Grande Prêtresse, nous ne pouvons plus l’ignorer.