J’ai caché mes yeux derrière les tiens.
Que ton corps fasse barrage au soleil!
J’ai caché mes blessures à l’abri de la lumière
Pour priver ma peur de la vitamine D dont elle a besoin pour se réparer.
J’ai voulu me mirer et me mirer encore dans les ombres: qu’elles aspirent toutes mes couleurs
qu’elles me rendent ce qui est mieux
Le néant
J’ai appelé le néant de mes vœux. J’ai voulu lui donner ma vie.
J’ai voulu vivre où tout aspire la vie. En attendant la mort.
J’ai prétendu n’exister que terrée dans les grottes.
A moitié mousse, à moitié crotte.
Mélange des réjections des chouettes, de la pisse des ours et des traînées gluantes des vers









J’ai vécu les histoires des rêves
les visions des sorcières
l’amnésie des traumas
Je n’ai pu être moi. Sans les morceaux de mémoire que j’avais enterrés, comment être?
Comment être moi?
J’ai caché mes yeux dans la cage thoracique de la louve.
J’ai suspendu mes boyaux aux stalactites.
Comment être moi? J’en ai avalé des couleuvres, en quête d’un récit qui me ramènerait à moi-même. Des vertes, des translucides et leurs mues.
J’en ai chéri, des hallucinations censées rétablir un soupçon de sens. J’en ai enlacé, des illusions.
J’en ai lacéré des peaux! J’en ai léché des plaies! Je me suis abreuvée de mes lamentations pour les transmuter en sérum de vérité.
J’ai tenté de m’extraire.
Le néant.
Dans les étreintes de la mère-louve, j’ai étouffé mon désespoir. J’ai suffoqué sous sa garde.
J’ai mâchouillé du lichen, transformant ses extraits en potions abortives afin de condamner mes renaissances. J’ai agrippé la pierre en me tordant de douleur, en maudissant mon destin, l’impossible renouvellement.