Toutes les larmes versées Toutes les tisanes concoctées Toutes les sécheresses endurées Et les tempêtes traversées
Aucune leçon Bien des frissons Nulle revanche Quand on émerge d’une avalanche
Un entêtant « j’ai survécu » Suivi d’une oraison Pour cette mort que je n’ai pas vaincue Pour ces mort.e.s dont Rien ne me distingue qu’une Vague chance, un « waw j’ai du cul »
Et puis quoi? Réapprendre A vivre Se recréer de tendres Rêves De toutes mes forces, tendre Vers ces rives Et puis me détendre C’est la trêve
Le 9 d’eau. Se chercher des envies.
Avec le Tarot Souverain.es d’Emmanuel.le Fontaine et la sauge de l’abbaye de la cambre un jour d’automne.
Le tarot me transperce le cœur. Cet outil m’est indispensable. Il m’aide à être pleinement présente. Avec lui, je déjoue mes pièges. Je cherche à ajuster. Avec lui, je suis dans le néant. Je me pose aux croisements quand rien n’est clair. J’emprunte des chemins quand la brume se dissipe. Je me transforme. Avec lui, je vois par-delà la poudre aux yeux. Je ne m’arrête pas aux apparences. Je suspends la rationalité cartésienne, une idéologie au service des systèmes capitalistes, racistes et sexistes. J’épouse une logique enracinée, encorporée, connectée, qui me paraît ancestrale. Je me raconte peut-être des histoires… Je raconte indubitablement des histoires avec le tarot, en réalité. C’est un compagnon conteur.
Du doute, des liens
Avec lui, je refuse d’avoir réponse à tout. Je renonce aux explications indémontables. J’observe les transformations. Je renonce à posséder et à hiérarchiser. Je m’ouvre aux conversations. Mon regard sur le monde change. Le champ de ma perception s’élargit. Les détails deviennent d’incontournables pièces au puzzle. Plus rien n’est insignifiant. Les signes foisonnent. Mes récits se reconfigurent. La vision d’ensemble porte plus loin. Elle englobe davantage. Les compréhensions se multiplient.
En compagnie du tarot, les ponts se créent. Ils se déplacent et modifient les destinations en chemin à la façon des escaliers de Poudlard. Ils se co-construisent. Les ponts se créent. Je me dévoile à moi-même, autant que les facettes d’un monde que je croyais jusque-là désenchanté. Les aller-retour entre mon être et le monde sont féconds. Ils nourrissent un courant. Le tarot se ressent au confluent de sources inépuisables. Est-ce mon intuition? Est-ce un message divin ou ancestral? Est-ce le lieu qui parle? Des sources inextricables les unes des autres. En grande partie insondables.
Langage et clivages. Tarologie vs taromancie?
Le tarot m’apporte des images et un langage auxquels je contribue en retour. En écrivant. En créant. En partageant. A chaque lecture – pour moi, pour d’autres ou plus-qu’humaines. Le tarot existe et grandit parce que nous le remplissons. Nous le nourrissons autant qu’il nous nourrit. Nous étendons l’éventail de ses significations. Nous substituons nos expériences à celles qui nous excluent du discours du et sur le tarot.
Le tarot est un langage. Ses interprétations sont infinies. Ce n’est pas une science. Le logos l’épuiserait si je m’y arrêtais. La tarologie, l’étude et l’analyse du tarot, ne forme donc qu’un aspect, en dialogue constant avec la taromancie. Dans ce domaine, les mots ne suffisent pas, à part peut-être quand ils s’agencent sous forme poétique.
La divination par le tarot est incernable. Rigueur et méthodologie la soutiennent. Ce sont des fondations qui se passent de murs. Elles ne peuvent enfermer la pratique. Il faut laisser de la place pour l’enchantement aussi mystérieux qu’il paraisse. En tant qu’humaine, je suis en effet dépourvue d’un langage complexe pour dire les courants du tarot. Il nous faut des mythes pour tenter d’expliquer la complexité de l’ “Invisible” (encore un mot réducteur). Ceulles qui s’essaient à le rationaliser échouent, imbu.e.s de leur humanité. Je vous raconte ma relation au tarot en un mélange de mythes, de poésie et d’images. Imparfaitement retranscrite, elle participe aux flux de transmission autour et avec le tarot..
Avec des figures comme La Grande Prêtresse, le tarot m’enseigne aussi la vacuité des dichotomies comme systèmes explicatifs. Aucun mur ne s’érige non plus entre la tarologie et la taromancie.
A nouveau, reformuler, tenter d’approcher, tournoyer, mélanger.
Le tarot est un art
Je ne peux que convenir qu’un jeu de tarot est un outil. Je ne peux pas m’en contenter cependant car c’est une définition ad minima. Elle ne heurtera personne. Inclusive, elle invite les récalcitrant.e.s. Mais il faut dépasser le constat. Il faut tester l’instrument. Il faut répondre à son appel. Ou bien initier la relation.
De là, le tarot est avant tout un art et, par extension, un portail. Sa pratique est mouvante. Multiple. En expansion. Dans le même mouvement qui nous ramène au présent, en ce lieu, à nos corporalité, il se déploie. Il ramène. Il essaime. Il rassemble. Il emmène.
En tant qu’art, il s’appuie sur l’expérience, sur des dosages et sur des réajustements. Il se développe à mesure que nous co-créons. Rien ne peut le contenir (même s’il peut jouer le rôle de récipient et contenir ce que nous lui confions).
La curiosité meut l’artiste. La créativité constitue un de ses meilleurs atouts. Le tarot est un imaginaire. Une praxis. Une fabrication. C’est la magie telle qu’elle se vit. Le tarot ne m’intéresse pas sans sa magie. Sans son pouvoir d’ouvrir et celui de contenir, il n’est rien pour moi. S’il n’est pas un portail, pourquoi existerait-il?
Ici, en vidéos et ailleurs, je veux vous transmettre la magie dont je fais l’expérience grâce au tarot. Je n’ai cependant pas l’intention de rebuter les personnes qui ne partagent pas cette conception. J’incorpore les paillettes magiques et les murmures des “autres mondes”. Je saupoudre les merveilles que le portail m’offre de ressentir. Il n’est pas nécessaire d’y goûter ni d’y adhérer. Vous pouvez rester sur le seuil et observer. Je n’impose aucune vision du tarot. Mon objectif serait plutôt de vous inspirer pour développer la vôtre en relationnant avec les cartes.
Mon tarot, votre tarot, notre tarot
Puisque rien n’est figé, je vous invite à prendre note de votre vision du tarot aujourd’hui. Si vous êtes coutumier.e de cet exercice, pourquoi ne pas plonger dans vos archives? Et, surtout, n’oubliez pas d’y revenir. Quel ravissement de prendre la mesure du chemin parcouru avec le tarot ! Quand je relis mes notes de 7 ans déjà, je réalise que l’art du tarot m’a changée. Je fais le vœu que cela continue. Pour moi, comme pour vous.
Il n’y aucune recette. Aucune ligne d’arrivée. Il y a de la transformation. Assurément. De la co-création. En ce compris avec le tarot. Comme nous, il est en perpétuel évolution. Témoin et parfois reflet de son temps, des normes, des pouvoirs en place. Témoin et parfois reflet des existences marginalisées. J’écris avec lui depuis mes marges. J’écris pour vous et pour votre anormalité. J’écris parce que le tarot est votre outil, votre art, votre portail.
Ah, l’équinoxe! Ses lumières, ses odeurs, ses couleurs! Et cet instant suspendu où la durée du jour et de la nuit sont en équilibre. Ce tournant avant que l’obscurité domine nos journées pour 6 mois. Cette entrée dans une saison sombre jusqu’à ce que les jours rallongent progressivement à partir du solstice d’hiver.
J’adore les équinoxes pour cette harmonie conjuguée à un basculement. L’automne m’émerveille parce que l’hiver me pèse. Il m’est impératif de profiter, d’accueillir, d’ouvrir, de célébrer. Et de célébrer avec vous évidemment! Pour le Solstice d’été, j’avais proposé des mini-tirages personnalisé sur insta. Cette fois, c’est en version écrite ici et en vidéo sur youtube et dans un format plus généraliste. Après la lecture des cartes d’introduction, je vous invite à piocher dans les interprétations en fonction des positions qui vous intéressent.
3 tarots m’ont accompagnée au Parc Tournay-Solvay, aux étangs de Boitsfort et en Forêt de Soignes pour ces tirages: le Gentle Tarot, le Slow Holler (épuisé) et le Fifth Spirit Tarot.
NB: Je retranscris mes textes par saisie vocale. Des fautes échappent à ma vigilance.
Le thème de ce tirage
Sur le seuil, au bord de l’automne, tu te sens t’étendre. Tu te sens des envies. Tu es traversé.e de désirs frétillants. Tes rêves dansent avec tes idées.
Sur le seuil, la tentation est forte de se (con)tenir, fasciné.e par les possibilités, transfiguré.e par ce qui pourrait se développer. Ou peut-être es-tu animé.e par la tentation de te propulser de toutes tes forces vers demain, de te donner tout.e entièr.e à l’énergie de création.
Le 2 de bâtons suggère cependant de prendre encore un peu de hauteur. Il invite à gravir la colline pour profiter du point de vue le plus porteur. Tu auras besoin de la vision à 360° pour balayer du regard autant ce qui verra le jour que ce qui t’a amené.e ici, ce parcours sinueux, ces aides précieuse, ces ornières douloureuses.
Le 2 de bâtons te demande d’être présent.e pour le seuil en tant que portail merveilleux capable d’élargir ta vision. Avec le 8, il te demande de faire de la place à tes impulsions et à ton envie d’agir rapidement, sans toutefois y céder, de les comprendre sans les laisser t’incendier. Avec le 5 de bâtons, il te demande aussi de créer de l’espace pour tes réticences – pas par autosabotage mais parce qu’elle gronde pour une raison. (Par exemple, prendre le temps de t’assurer que tu pourras te chauffer cet hiver, ce n’est pas de l’autosabotage). C’est le moment d’investiguer tes errances, tes dispersions, et aussi ta colère. Quels sont leurs messages ? Faut-il les libérer ou en faire des alliés puisqu’elles sont là pour durer ?
À l’équinoxe, l’équilibre magique du jour et de la nuit nous rappelle de prendre le temps de regarder et de tester nos balances et nos réservoirs d’énergie pour la saison. Le 2 de bâtons confirme la beauté des temps d’arrêt en période d’expansion. Profite de la vue ! Sur le seuil, tu es entre deux étapes, ni tout à fait dans l’une, ni tout à fait dans l’autre.
L’équilibre magique de la transformation…
Pour honorer cet instant de recueillement et d’ouverture, on va poursuivre avec les positions de tirage suivantes:
Oh oui, ta vision est belle Oui elle scintille de mille feux Oh bien sûr, elle t’emballe Evidemment, tu aurais envie de la suivre jusqu’au bout du monde
Mais c’est un projet au long cours
Non seulement tu auras besoin de ressources au-delà de la passion initiale, Mais également ces branches doivent encore pousser Elles doivent aussi se dévêtir pour l’hiver Revenir à leur essence pour mieux s’ouvrir.
Tu vas grandir avec ta vision
Ta branche va s’ouvrir jusqu’à t’emmener vers des arborescences inattendues. La sève va parcourir ses ramifications au rythme de ton cœur.
En prévision du voyage à venir, la précipitation serait une perte d’énergie. Garde ta vigueur ! Enchante-la!
Et garde aussi une trace de l’excitation qui te parcourt, de tes envies débridées.
Ne pas forcément les suivre mais les retranscrire pour mieux les voir évoluer.
Les semeur.ses de haine. Ceulles qui agitent leur bien-pensance, leur religiosité, leurs apparences Ceulles qui lissent le vernis de protection de leur violence Ceulles qui nous dépeignent comme le Mal, la tentation, le péché Ceulles qui essaient de nous étouffer Ceulles qui cherchent à nous anéantir Ceulles qui nous agressent Nous crachent à la gueule, nous emprisonnent.
Ceulles qui répandent leur haine sur le monde, en nous, en eulles-mêmes.
Ceulles qui mentent pour nous diminuer Qui manipulent pour se poser garant.e.s de la vertu, de la vérité, de la pureté Ceulles qui se positionnent comme moralement supérieur.e.s Qui oppriment Qui oeuvrent perpétuellement à nous rappeler notre infériorité Ceulles qui prêchent contre, qui altérisent, qui hiérarchisent
Ceulles qui possèdent, qui exploitent, qui maintiennent sous leur joug Ceulles qui divisent, qui cherchent à régner, qui amassent, qui écrasent Qui écrasent. Ceulles qui détiennent le pouvoir et qui s’y accrochent
Ceulles qui immissent leurs chaîne dans nos vies Qui s’engouffrent dans les fenêtres de Nos sursauts de liberté, nos pulsions de vie, nos instincts de défense.
Ceulles qui écrasent
Qui écrasent la rébellion Qui se sentent menacé.e.s par l’existences “des autres” Par leurs droits, par leurs amours, par leurs culs, par leurs origines,… Ceulles qui se pensent plus naturel.le.s, plus légitimes Ces suprémacistes qui chient dans leur froc De peur qu’on s’accapare leur statut, leurs biens, leur monde
Le Diable
L’illusion de normalité Tout ce qui la maintient Tous les leurres vers lesquels il nous arrive de nous tourner Dans l’espoir d’y survivre
D’autres faces
Toutes les forces qui luttent. Ce qui entrave le pouvoir-sur. Ce qui envoie chier la normalité. Ce qui questionne les frontières. Les perce. Leur fout le feu.
Toustes ceulles qui abolissent les prisons. Ceulles qui détruisent les chaînes. Ceulles qui refusent.
Les blessures infligées par Le Diable Le moment où on les écoute Quand on se dépêtre d’elles Quand on essaie de les dépasser, quand on y renonce, quand on s’enlise, quand on accepte qu’elles font partie de nous Aussi terribles soient-elles.
Quand on comprend qu’on n’est pas plus vertueuxse. Qu’il ne sert à rien de se construire comme moralement supérieur.e. Quand on est toustes lae foireuxse de quelqu’un.e. Et quand on excelle à ce jeu. Qu’on brise des cœurs. Qu’on maintient ce qui nous effraie sous emprise ou son contrôle: des gens, des animaux, des endroits, des esprits,…
Quand on serre trop fort ce qu’on veut retenir Quand on se définit uniquement par rapport au Diable – qu’on y aspire ou qu’on veuille le détruire On goûte un peu au Diable On revêt ses masques On maintient son joug
Quand tout ne tient qu’à un fil à l’ombre de la Tour Quand le Diable tend le miroir déformant de nos ombres
Quand on ne conteste pas ce qui nous morcelle. Quand on se croit cassé.e, au-delà de toute réparation. Tordu.e, au-delà de toute considération.
Pour célébrer cette nouvelle carte du tarot que nous co-créons avec mon épouse RoseButch!
Visualiser la Grande Prêtresse
Regarde-moi! Je suis ici depuis si longtemps que je me suis fondue dans les lieux. J’ai fusionné avec les éléments. Les araignées tissent leurs toiles autour de moi. Elles défient la gravité. Elles prennent le temps. Je me dois d’être précautionneuse pour respecter le fruit de leur labeur. Pour qu’elles se nourrissent. Pour que leurs voiles gardent les profondeurs de la caverne.
La mousse s’attache à mes semelles. L’humidité ne m’affecte plus comme avant. Elle assure la fertilité de l’existence souterraine. L’obscurité ne m’effraie plus. Mes sens ont pris l’habitude de ne plus tout trier, tout savoir, tout comprendre. Je ressens. C’est déjà bien assez!
Pose-toi sur la roche sans troubler les stalactites ni te heurter aux stalagmites. Regarde-moi.
Je suis là depuis si longtemps. Nous co-existons depuis si longtemps. Tu connais pourtant bien peu de moi. Tu me sens à peine respirer. Il t’est loisible de m’oublier.
Regarde-moi de temps en temps.
trempe tes doigts dans l’eau des profondeurs dirige ton regard vers le croissant de lune laisse l’ineffable t’hypnotiser ta mémoire ancestrale te revenir tes réflexes animaux te conduire tes connexions se rétablir l’Invisible t’emplir l’intuition te nourrir
Tourne-toi de temps en temps vers tes instincts sachants vers ton puits de connaissance que rien ne valide, rien n’invalide à part la certitude intuitive de ton corps, de tes sens et de ce qui passe leur filtre ce qui frôle, qui s’appuie, qui coule Reste là le temps de sentir la puissance le temps de te sentir changé.e chargé.e
Comprendre La Grande Prêtresse
Impassible? Passive? Insensible? Au contraire!
La Grande Prêtresse est assurément calme. Mais derrière sa mine imperturbable? Tout comme derrière le rideau tendu derrière elle: tumultueux!
Comme carte associée à la Lune, c’est inéluctable: la Prêtresse est une carte de changement! Nous observons tout un cycle de ce satellite en 29 jours. Les émotions fluctuent. La Lune, corps céleste humide, leur trouve du liant. Elle les mélange. Elle colle avec ses fluides les faces et les phases morcelées.
Si la Grande Prêtresse paraît austère, c’est qu’il y a fort à faire. Si iel est inactif.ve, c’est qu’iel est connecté.e à des fréquences, des mondes, des profondeurs qui exigent un état de concentration absolue. Iel n’est pas en retrait de ce monde. Sa connaissance des fils qui relient les différents mondes lae rend très présent.e. Iel prend son temps parce qu’iel ne laisse pas l’urgence des humain.e.s et leurs pendules capitalistes dicter son rythme. On lae taxe d’indifférent.e. Iel vibre au rythme des secrets.
Perchée, au sommet du monde, ou au bord du précipice, tu prends une respiration. Tu sens l’air te parcourir toute entière. Et si c’était ça, l’effet d’un premier souffle? Te sentir t’activer. Te sentir prête. Tu expires. Tu chasses l’air en dehors de toi. C’est comme si le zéro de la carte se désemplissait, se donnait intégralement au monde. Ton diaphragme se relâche. Puis, il rebondit tel un tremplin.
Et toi? Tu bondis!
Tu te jettes à l’Inconnu dans un moment d’insouciance totale.
“Quelle inconscience totale!” Les murmures effarés te parviennent à peine.
Il faut changer. C’est inconfortable. Mais la position précédente l’était davantage. Sclérosante.
Il faut éclore. Il faut prendre le risque. Le sens du danger se mêle à l’euphorie.
Tu ne resteras pas là où on t’attendait. Ni telle que tu te voyais. Ni bien rangée. Ni convenable. Tu n’accepteras plus rien sans broncher.
Tu as sauté. Pour l’instant, il n’existe que cette chute. Et ton cri. Tu rugis. Qu’advienne que pourra! Tu frémis. Tu te fiches de dissocier la terreur de l’excitation. Tu as bondi!
Ton élan ouvre le champ des possibles.
Analyser le Fou
Joker du tarot, la Folle représente la puissance qui nous propulse dans le vide pour un nouveau voyage.
Qu’est-ce qui est à l’origine de ce plongeon? Reçoit-on une tape de l’univers dans le dos, un condensé de l’énergie des As? Est-on poussé par un élan venu des tripes? Nos compagnons, à l’image du chien souvent représenté, incarnent-iels le soutien? Ou le confort qu’on laisse derrière soi? Le baluchon est-il aussi léger qu’il le paraît? S’avèrera-t-il rempli tel le sac de Mary Poppins?
Peu importe pour la Folle! Elle tient une fleur symbolisant l’innocence. Son parfum l’enivre. Peu importe car la carte zéro contient toutes les possibilités. Ainsi que ce qui est indéterminé. Puisque rien n’est saisisable dans l’oeuf qu’est le zéro, la carte de tous les possibles est aussi celle du néant. Plus qu’un saut dans le vide! Une célébration de l’Inconnu!
Le joker du tarot, à la fois dehors et dedans, partout et nulle part, est fondamental pour les 78 cartes. Il assume un rôle comme aucune autre. Il assure la circulation. Il opère comme une activatrice. Il a pour fonction de nous secouer, de nous surprendre, de nous aider à nous élancer. Iel nous accompagne dans les grandes étapes de la vie. Iel nous encourage dans notre exploration du tarot.
Dans le système de l’Ordre Hermétique de la Golden Dawn, la Folle est associé à l’élément air. C’est le vide du précipice. Le vent qui nous portera. C’est l’inspiration au moment où on entame quelque chose de signifiant pour soi. Au niveau des correspondances ésotériques, l’air est l’Est, le point où le soleil se lève, le commencement.
Avec le 2 de bâtons, nous sommes sur le seuil, au point de départ. Quand, nous trouvons le 3, nous sommes en route – que nous soyons au début de la transition, en train de planifier ou au beau milieu du pont, en train d’ajuster notre trajectoire. Si le 2 est sur le pas de la porte, encore hésitant-e, là où tous les possibles sont envisageables, le 3 de bâtons a réalisé le tri. Il navigue les possibles. Il est le portail, comme une capsule spatio-temporelle qui (ré)unit les époques et les lieux. Ou comme un point de convergence.
Partant de la notion de pont proposée pour le 3 de bâtons par Lindsay Mack dans l’épisode 187 du podcast Tarot for the wild soul, je parviens à trouver les mots pour distinguer le 2 et le 3 de bâtons. De notre position présente, le 2 nous relie au passé pour mieux envisager l’avenir. Il nous amène à passer en revue nos bases et notre parcours. Il nous confronte à la nécessité de faire des choix pour faire place à la transition que nous espérons. Le 3 de bâtons, quant à lui, fait office de pont entre le présent et l’avenir. Il représente tout ce qu’on met en place pour assurer la transition. Comment allons-nous créer sur base de notre vision? Comment évolue ce que nous créons?
Dans les quatre suites du tarot, les 3 symbolisent la magie du rassemblement: interactions, ce que l’on crée ensemble, ce que l’on partage. Les préfixes co- et inter- conviennent bien aux 3. La magie du 3 de bâtons? Celle du voyage dans le temps. Une énergie visionnaire. La capacité de se projeter. Naviguer les possibles.
Je ne sais plus comment être sur les réseaux sociaux. Les lanceur-ses d’alerte confirment que le groupe facebook est encore plus violent que tout ce qu’on savait déjà.
Il ne s’agit plus seulement de ne pas alimenter cet égrégore qui retire le pire de nous-mêmes. Il en va de la lutte contre la montée du fascisme, dans laquelle l’entreprise joue un rôle affolant. Bien sûr, il en va de l’exploitation et de la sécurité des données. Tout ça et plus encore. Chaque jour davantage. Plus de dossiers, de manipulation, de morts.
La nausée. Au-delà du malaise, cette question persistante: que me dit mon intégrité? Je connais la réponse. Tu la connais sans doute aussi. Mais il y a cette illusion bien entretenue que nos existences dépendent de notre présence ici. Une dépendance construite année après année. Biopolitiques. Et de l’impossible subsistance en capitalisme pourrissant.
On se décompose. Je le ressens comme ça. C’est dur à accepter. Et l’indispensable rêve de régénération en capitalisme pourrissant.
Malaise. Comment se révolter? Pas ici. Pas là où l’indignation nourrit la matrice nourrit les complotismes nourrit le fascisme nourrit toutes les haines. Dont celle de soi. Compensée par une chimérique rédemption que nous offrirait instagram: poster plus, acheter plus, se comparer encore, s’assimiler mieux, encore, encore.
J’ai la révolte facile. Je ne sais plus comment exister ici. Les rouages de la machine ne m’épargnent pas. Même si je les observe depuis longtemps. Je suis dedans. Il n’y a pas d’extérieur au capitalisme.
Derrière ce que me dit mon intégrité, il y a aussi le dedans de ce qui est ici. Les comments et pourquois. Le timing et les alternatives. Et toi et toi.
J’ai décidé de ne pas trancher dans l’immédiat. L’immédiateté, un autre produit néolibéral. Je peux décider de me distancer de la notion d’urgence. La lenteur est résistance.