Perspectives de libération handie sur le contexte politique actuel

Pourquoi l’amour semble demander beaucoup plus d’efforts que la haine? Et pourquoi poser cette question toute en dichotomie? 

Parce que je ne sais plus par où commencer… éreintée et, logiquement en conséquence, peu inspirée. Éteinte peut-être. Mais je me mets à écrire pour les autres personnes qui se sentiraient éteintes. Pour allumer quelque chose. Quelque chose d’aussi simple que de l’espoir? Ou d’aussi vital que du lien? J’étends mes filaments. Je tends la main. En hyperextension, toujours, par la magie d’une maladie du tissu conjonctif. 

Ça sonne juste de commencer ici. Un acte protecteur: je réclame la maladie comme magie. Qu’il en soit ainsi. Je me donne cette force. Je reconnais la puissance de mon corps faillible. Cet acte performatif me protège, le temps de la rédaction, des attaques sociétales et politiques envers nos existences malades, nos existences handies et, plus largement, toutes les existences non-productives selon des standards capitalistes. Magie apotropaïque; bouclier contre les hiérarchies. 

Pause le temps d’ouvrir un onglet pour vérifier l’orthographe du terme “apotropaïque”. La maladie chronique fait ça aussi. Les mots ne restent pas sagement dans une définition ni dans une prononciation. Ils dépassent leurs limites. Ils s’interchangent. Ils se polluent mutuellement. Il n’y a pas de pureté dans la maladie. Cela participe probablement à la rendre si terrifiante pour les suprémacistes de tout bord. Repousser les malades et les handies ne les protègera pourtant pas de leurs faiblesses, ni de l’effondrement de leurs propres corps face aux machines de guerre de toutes sortes. Quand leur tour viendra, il n’y aura plus rien pour les protéger de leurs douleurs. J’essaie de ne pas souhaiter la maladie aux gens qui souhaitent se débarrasser de nous. Je sais que les corps valides sont transitoires. Je n’ai pas besoin de verser dans la haine. Mais je dois me le rappeler. Ne pas répondre à celleux qui mettront tout en œuvre pour nous anéantir par les mêmes méthodes qu’elleux. 

Je suis venue à l’ordi avec cette grande question: les méthodes, l’organisation, le rassemblement, la résistance, l’émergence… Il me faut encore m’agiter autour de cette question pendant quelques paragraphes avant de tenter de l’approcher. 

C’est bizarre d’écrire pour le blog. Depuis quelques années, j’y reviens sporadiquement: soit pour partager des écrits récents, soit pour publier certains des textes entassés dans mes carnets. C’est qu’avec le temps, je ne ressens plus de satisfaction à publier instantanément. Les réseaux sociaux ont fini par briser la fertilité de ce processus. De sorte qu’écrire pour publier devient mortifère. Cet acte porte en lui son extinction. Je ne serai pas la curatrice de mes pensées, ni de mes textes canalisés, ni des riches toiles de relations qui m’emmêlent au territoire. A l’heure des réseaux sociaux, je n’ai plus rien à offrir qui pourrait dans le même temps nourrir les grandes entreprises entretenant la haine. Mon dernier avatar sur les RS, un compte public sur instagram, est en pause depuis des mois. 

Depuis quelques semaines, je n’ai plus envie de publier des vidéos non plus. C’est comme ça. Je vais et je viens. Mais aussi… c’est plus profond que d’habitude. Déjà par conviction antifasciste. Pendant toute la campagne électorale en Belgique, j’ai vu les pubs du Vlaams Belang s’afficher en amorce de presque toutes les vidéos que je regardais. Le parti d’extrême-droite flamand, le deuxième parti du pays. On s’attendait à ce qu’il remporte haut-la-main les élections en Flandre. Victoire de la haine. Finalement, c’est un moindre mal qui l’a emporté, un parti nationaliste séparatiste lui aussi mais plus néolibéral, pratiquant des politiques d’austérité, anti-sociales et largement racistes. Il ne se dit pas d’extrême-droite malgré l’ambiguïté de bon nombre des politiques menées. Il ne se dit pas d’extrême-droite parce qu’il respecte la démocratie.

Voilà, on s’approche de la question ou du fil rouge: les systèmes dit démocratiques s’effondrent. Les murs s’écroulent sur nos gueules. Les pierres atteignent d’abord les plus précarisé.es: les personnes non-blanches, les personnes pauvres et celleux qui ne peuvent pas courir pour se mettre à l’abri, les malades et les handi.es. L’écocide commis n’a connu aucun précédent. Celleux qui pensent se mettre à l’abri à court-terme seront rattrapé.es par l’effondrement. Iels ont oublié qu’iels appartenaient elleux aussi au Vivant. Iels ont cru que la destruction à laquelle iels participaient les épargneraient


Trêve de prophéties scatologiques. On n’a pas besoin de rajouter du drama à nos situtations. Le drama est une fuite. Nos cerveaux connaissent bien cette réaction post-traumatique. Je prends quelques respirations profondes pour revenir dans le présent au lieu d’imaginer le pire. Je vais bouger et boire un grand verre d’eau. Avec le SED, le corps a besoin de mouvements doux pour tenir. Le processus d’écriture est incompatible avec la condition avec laquelle je vis. Mais je n’oublie pas qu’elle est magique. Dans le cas présent, l’obligation de bouger, d’hydrater mes tissus, empêche mon esprit de faire des boucles narratives au sujet des pires scénarios. Elle est magique car elle me sauve. Je ne peux ni stagner, ni foncer. L’équilibre est une nécessité à ma survie. D’une manière plus accrue que pour d’autres; il m’est impossible de l’ignorer. En général, les récits de la maladie comme super pouvoir servent socialement à distinguer les “bons handies” des mauvaises – du genre les athlètes qui “dépasseraient” leurs conditions des autres, médiocres et indignes de vie, indignes de droits. Ils ont aussi pour fonction de masquer les douleurs, et les maltraitances médicales, et les obstacles dans l’accessibilité à l’espace public. Ils idéalisent au lieu de rendre compte de nos vies en somme. En général, on n’a pas besoin de ce genre de discours sur nos corps. Mais c’est différent aujourd’hui. La magie de mon corps agit comme un cercle sacré afin de rédiger ce texte. Elle est le rempart à l’eugénisme sous-jacent dans les prises de décisions contre “les malades de longue durée” et autres groupes sociaux et/administratifs considérés comme des tares.

Cette pause, j’ai dû la passer à câliner mon chat, Babelutte. L’enchevêtrement du vivant. Le soin. La douceur. Nos vies sont inextricables. Nous sommes co-responsables d’autres vies que la nôtre, dans une grande toile d’interconnexion. Pause dans la rédaction de cet “article” fouillis. Retour pour expliquer la pause de la création de vidéos. En fait, il y a toujours une ramification de causes d’importances diverses et plus ou moins personnelles. Je voudrais parler surtout de celles qui sont liées au contexte politique actuel. 

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Le langage d’une malade chronique (3 de branches, 8 de vases, 4 de pentacles)

Quand le langage de la douleur chronique
Compose sans mots

Quand les perspectives
Rencontrent la dissociation
Rencontre des cuillères au rabais

Me tirer les cartes + me tirer le portrait
Tarot + selfies
Moyens d’expression

Qui peut déterminer
Ce qui rend correcte
La communication?

Ce qui rend valable
L’art?

Qui valide?
Qui est valide?

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Tarot + selfies
Tenter de projeter, de planifier
(3 de branches)
Vouloir échapper
A un corps
Qui s’effondre, qui s’étire
Aux tissus conjonctifs
Qui tiennent, soutiennent
Craquent, se déchirent Lire la suite « Le langage d’une malade chronique (3 de branches, 8 de vases, 4 de pentacles) »

Tarot queer / tarot et santé

Dimanche cocooning pour toi? Alors, tu auras peut-être envie de jeter un coup d’œil à ma chaîne youtube.


J’ai publié une vidéo avec des réflexions complémentaires sur la queerisation du tarot et une autre qui amorce une série sur le tarot et la santé. J’y parle de maladie chronique et de consistance dans la pratique, d’éthique du tarot dans ce domaine, de tarot poétique avec le corps, d’instagram,… (haha et à chaque fois que je m’écoute je réalise que je n’arrive pas a prononcer le mot « corps » correctement😱).

Activation mastocytaire

Crawling under my skin
Imbuing my senses with venon
Keeping me up at night
You demand attention
I can barely stand
You command fever
You sprout out of me
Forcing to look at you
I don’t know how to answer
So I scratch
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Tu me démanges
Tu me ronges
Tu me démembres
Tu me refuses le droit d’être entière
Tant que je ne t’ai pas regardé.e t’échapper de moi
Mes ongles te réceptionnent
Tu te joues de mon hypermobilité
Tu rampes hors d’atteinte puis tu me perces ma peau Lire la suite « Activation mastocytaire »

Normes corporelles: résistance et pierres d’achoppement

Il y a des domaines où la badasserie corporelle ne percole pas. Elle reste cantonnée.
A part quand il fait si chaud que la perruque me donne des malaises, je ne sors pas sans elle. Ce n’est pas que je ne me montre pas sans elle. C’est que je ne sors pas sans elle.

J’anticipe les remarques. Pour ce pan de ma vie, j’opte pour le passing de la normalité. Si je n’étais pas trichotillomane et que je n’avais pas les cheveux irrémédiablement abîmés avec le crâne exposé par endroits, peut-être que j’aurais sciemment tondu mes cheveux pour jouer le décalage avec mes jambes velues. Sauf que c’est pas le cas. Je me rappelle les remarques. Les gens qui touchent ma perruque. Les profs qui me virent d’un auditoire bondé à l’unif parce que je porte un fichu ou une casquette gavroche. Tous les autres lieux auxquels je n’ai pas pu accéder sans justifications. Les mecs qui me demandent pourquoi je choisis de me couvrir et d’être soumise, qui me harcèlent si je ne réponds pas. Ces derniers exemples sont clairement des retombées du racisme/sexisme à l’égard des femmes voilées (vers 2004). En tant que femme blanche, ce que j’ai vécu est minime. Lire la suite « Normes corporelles: résistance et pierres d’achoppement »

Pour les valides, de la part d’une SEDiste (7 de couteaux et Le Précipice)

Aux valides (depuis le point de vue spécifique de mon syndrome d’Ehlers-Danlos hypermobile).

Qu’est-ce qui donne corps à ta définition de la réussite ? Comment fais-tu pour évaluer la faisabilité ? Sur quoi peux-tu te reposer ? Que deviendrait ta réussite si une journée de 2 heures de travail était une bonne moyenne pour toi ? Que deviendrait-elle si tes frais de santé engouffraient 5, 10, 50% de ton budget mensuel ? Comment organiserais-tu ton succès si un trajet en transports en commun te cassait pour une, deux, cinq heures par jour ?

Comment développerais-tu ton réseau et tes amitiés ? Comment bénéficierais-tu du soutien si précieux pour accomplir tes rêves ? Comment te rendrais-tu à un endroit où les chaises te déchires la peau, où la fumée t’agresse les poumons pour les 15 jours à venir, où la lumière te donne mal à la tête et le bruit t’empêche de te concentrer ? A quel point ta vision de la réussite dépend-elle de l’accessibilité que les autres (n’) assurent (pas) pour toi ? Quels points perds-tu par rapport à l’accessibilité ? Comment juges-tu les personnes qui ne travaillent pas comme toi ? Quelle valeur accordes-tu à la productivité? Lire la suite « Pour les valides, de la part d’une SEDiste (7 de couteaux et Le Précipice) »

Corps indisciplinés: 10 de Branches, Eveil, Le Monde, 9 de Pierres

Unruly Bodies. Corps Indisciplinés.

img_20190407_122104_9412614101997632977744.jpgLe 10 de branches pourrait narrer l’évolution d’un corps dont la colle, le tissu conjonctif) défaille.

C’est l’histoire de notre inventivité
Comment on se débarrasse des notions conventionnelles du succès
Comment on fait fonctionner à notre manière

C’est une carte de douleur ceci dit
Parce que nos manières
Nos façons handies de nous mouvoir et de vivre
N’ont aucune valeur dans un monde productiviste

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Les révélations et l’intégration se feront lentement
Acceptation, tolérance, assimilation
Autant de mots qui confortent les systèmes
Qui nous oppriment

L’éveil engage
De nouvelles visions
De nouvelles matérialités
De nouvelles corporalités
Il y a plus
Nos yeux si nombreux l’aperçoivent
Il y a bien plus

Pour l’heure, c’est juste bien de se créer des chez-nous dans ces corps qui ne peuvent pas / ne veulent pas se conformer aux règles. Des corps indisciplinés.

Le quotidien avec un Syndrome d’Ehlers-Danlos

Comme l’actrice Jameela Jamil sensibilisait au syndrome d’Ehlers-Danlos syndrome, j’ai fait mon interprétation de sa pose 😄 ❤️

fb_img_15540436661293336072388063716905.jpgLa vie avec un SED en costume glamour, ça peut le faire. Mais ça m’arrive pas des masses. Derrière la souplesse, l’hypermobilité, c’est des douleurs diffuses ou localisées, parfois constantes, parfois variables tandis que les muscles compensent l’hyperlaxité. La fatigue chronique aussi. Le collagène n’est pas présent que dans les articulations. La colle de notre corps, qui n’en fait qu’à sa tête dans les syndromes d’Ehlers-Danlos, affectent nos poumons, notre vessie, nos intestins, notre estomac, nos bouches, nos oreilles, etc. Le SED est imprévisible: on ne sait pas quelle partie du corps va nous lâcher d’un jour à l’autre, ni même comment on ira d’un jour à l’autre. Ni d’une personne à l’autre. On peut être en fauteuil pour les déplacements tout comme on peut maintenir beaucoup d’activités sportives. Lire la suite « Le quotidien avec un Syndrome d’Ehlers-Danlos »

Étendre son humanité

Voilà un message à écouter en reprenant le travail en état de dépression, burnout et douleurs chroniques. ❤️
J’ai remarqué que la dépression peut rendre tellement absorbé.e par sa propre souffrance qu’il en devient impossible de militer, de maintenir le contact avec les ami.e.s, d’aller au devant des rencontres et de ressentir de l’empathie. Ce n’est pas une généralité, mais ça arrive. J’ai perdu des ami-e-s à cause de ça, que ce soit à cause de ma phase dépressive, de leur dépression ou de nos états respectifs.

Ces cartes d’oracle ravivent mon humanité. Lire la suite « Étendre son humanité »